samedi 28 juin 2014

Nous sommes responsables de la survie de nos institutions culturelles



En parallèle avec ce blogue, je navigue sur le site Mauvaise herbe depuis septembre 2013. J'y accoste au moins une fois par mois. Lorsque je publie une nouvelle chronique sur MH, je redonne un second souffle à la chronique du mois précédent.

Mon texte, publié le 28 avril 2014 : Nos choix déterminent notre avenir


Samedi dernier, 25 avril, l’Orchestre symphonique du Saguenay–Lac-Saint-Jean présentait La Traviata devant une salle comble. Pendant que tout en moi exultait de plaisir à entendre le magnifique mariage des voix de la soprano Aline Kutan et du baryton Jean-François Lapointe, j’ai anticipé le fracas d’une fissure menaçant l’avenir de notre conservatoire.  Victime d’une décroissance, où le nombre de 125 élèves en 1980 est de 45 en 2014, l’institution est-elle appelée à disparaître? Une des options envisagées par le ministère de la Culture, dont les médias ont fait état au début d’avril, consisterait à exiler les élèves du collégial et de l’université à Montréal et à Québec, tandis que ceux du cours préparatoire devraient s’inscrire au privé. 

Jacques Clément, directeur artistique
Chef de l'Orchestre symphonique du Saguenay–Lac-Saint-Jean

Les conséquences seraient désastreuses, confirment en chœur Claude Tanguay, président du syndicat des professeurs de l’État du Québec et Jacques Clément, chef de l’Orchestre symphonique SLSJ.  « On pourrait mettre aussi en péril l'avenir des orchestres en région, parce que dans toutes les régions, les professeurs et les étudiants participent à la vie de l'orchestre symphonique. »

Opter pour une amputation « curative » provoquera certes des pertes d’emplois – encore! – mais pire, dépouillera la région de cet ancrage nécessaire au maintien d’une vitalité musicale que tant de parents ont contribué à construire pour nos enfants. Que deviendraient notre orchestre symphonique, notre chœur symphonique et notre Quatuor Alcan? Peut-on poser la question?

Avant de tuer le corps, sous prétexte d’une décroissance, ne devrait-on pas d’abord s’interroger sur la cause de cette décroissance? Qu’avons-nous fait de nos cours de musique dans nos écoles? Quelle culture musicale proposons-nous dans nos radios?

Hier se continue

Ce matin, furetant dans les archives de 38 ans de carrière journalistique dans le domaine des arts, un texte, publié dans le Progrès-Dimanche du 1er mai 2005, a surgi sur mon écran.  Hier se continue. Le propos de 2005 n’a rien perdu de son sens. J’en reprends les grandes lignes (en italique), adaptant certains énoncés aux faits présents.
 
Devant le déferlement des fermetures et pertes d’emplois au Saguenay–Lac-Saint-Jean serons-nous assez lucides pour, plutôt que de gémir, se demander si nous n’avons pas chacun notre part de responsabilité. Quand les présidents des grandes entreprises, banques et sociétés d’état, du haut de leur salaire de plusieurs millions consentis par des administrateurs complaisants (et actionnaires reconnaissants), ferment les yeux sur les conséquences des emplois sacrifiés sur l’autel de la croissance du profit, ne fait-on pas la même chose en demeurant sourds aux appels répétés de ces toutes petites entreprises qui demandent si peu pour donner beaucoup à notre région. Des exemples?  Les entreprises culturelles.

Certaines sont des PME (petites et moyennes entreprises), la majorité sont des PTPE (petites et très petites entreprises).


Samedi soir, 25 avril 2014, au dernier concert de l’Orchestre symphonique, j’ai vu quelques 800 personnes applaudir à tout rompre devant la prestation remarquable d’artistes de la région, musiciens et choristes accompagnant des solistes réputés sur la scène internationale. En achetant leurs billets, ces personnes auront contribué individuellement à donner leur soutien à ces artistes. Une contribution tangible qui s’ajoute à celle, oh! combien indispensable!, des commanditaires. Par sa présence, lors d’une production régionale, le public contribue au maintien de nos sociétés artistiques, que ce soit en musique, en théâtre, en danse ou, lors d’événement honorifiques dédiés aux artistes de la région comme le Gala de l’Ordre du Bleuet. Imaginons une présence accrue à chaque production locale. Combien d’emplois assurés?

Pour chaque production, pensons au nombre de personnes qui ainsi travaillent. Aux artistes engagés pour pratiquer leur métier, là où ils veulent vivre et élever leurs enfants. Aux enseignants des écoles privées et publiques dévoués à la formation de la relève. Somme toute, ce sont des millions de dollars qui circulent ici, en région. Vous voulez parlez d’économie? Les productions artistiques ont une réelle importance dans notre économie régionale.

Nous sous-utilisons nos forces et nos talents. Même dans nos célébrations historiques nous réservons les cachets les plus généreux à des artistes de l’extérieur. Nous surexploitons nos artistes résidents. Et, à si mal les rétribuer, ils doivent trop souvent s’exiler pour survivre. Nous avons des comédiens, des auteurs, des musiciens, des scénographes, des danseurs, des metteurs en scène (oh! combien talentueux!). Ils sont jeunes, créatifs, doués. Qui plus est, ils veulent rester dans leur région. Ils ne demandent rien. Ils nous offrent ce qu’ils sont, ce qu’ils font, provoquant par leur présence des retombées économiques et culturelles. Sur la glace d’une patinoire ou sur les planches d’une scène le spectacle prend son sens dans le regard du spectateur qui, pour le prix d’un billet, permet à l’artiste comme à l’athlète de continuer sa quête.

Bien sûr, la richesse collective croît parce que nos artistes créent. Est-il encore besoin de dire que les œuvres d’art, les créations littéraires et musicales, les arts de la scène, sont l’héritage de nos sociétés depuis des millénaires. Nos grands pontifes de la finance devraient, les premiers, favoriser le soutien aux arts, corporatif ou individuel, permettant de déduire, au même titre que les dons, les sommes déboursées pour les billets de spectacle (productions surtout régionales). Le but ultime étant l’émergence et le développement d’une société où les entreprises culturelles seront reconnues pour leur force économique au service de l’enrichissement du patrimoine collectif. L’objectif immédiat et non le moindre sera de maintenir et de multiplier des emplois pour nos jeunes artistes.
 
Finalement, l’avenir du Saguenay-Lac-Saint-Jean, c’est nous. Ce serait bien d’en être conscients!


mardi 10 juin 2014

Nous avons tous un Jonathan à pleurer


Dans les journaux on appelle cela un fait divers. Un accident de la route. Un mort. Quelques secondes de lecture. Un temps bref d'empathie. Parfois un commentaire. Et on passe à autre chose.

Dans les journaux, cela semblait un fait divers. Mais dans nos cœurs on a ressenti comme un grand froid d'hiver. Parce la personne morte dans un accident de la route n'était plus un quidam. Il a pour nom Jonathan. Il est aimé par des gens que j'aime, ces gens de la famille du cœur que sont, à mes yeux, les familles reconstituées. Et leurs larmes deviennent les miennes.

Hier, au salon funéraire, parmi sa famille et ses amis, et, donc ma famille et mes amis, je regardais la dépouille de Jonathan. Ce quidam de la route pour les lecteurs des journaux est le fils, le frère, l'ami et le jeune amoureux plein de projets. 

Dans chaque fait divers, je prends conscience que tous, nous aurons un Jonathan à pleurer.


mardi 3 juin 2014

Jean Laforge, tes enfants ont planté un chêne il y a 8 ans


Mains de Jean Laforge
© Photos Édith Ringuette


Un petit moment. Un temps bien court. Juste pour me souvenir que le 3 juin 2006 nous étions réunis ici, tes enfants, tes petits-enfants et nos amis pour te souhaiter longue vie sous la forme d’un chêne planté sur tes cendres. Toi qui ne voulais pas vieillir, encore moins mourir, tu te continues dans cet arbre emblématique.

 Le chêne Jean Laforge
3 juin 2014

Mais, cher papa, cher Jean Laforge, pourrais-tu dire à tes bourgeons de fleurir enfin dans ce printemps 2014, si froid parce que la planète surchauffe.

Sur une de tes branches, j’accrocherai le nom d’Édith – mon amie à qui je dois de très belles photos de tes mains d’artiste – parce que je pleure son départ récent.

Un petit moment. Un temps bien court. Pour dire que rien ne meurt si le souvenir est vivant.

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